La Rochelle était devenu le premier centre de dessalement européen d’eau de mer. Entre Saint Nicolas et la Chaîne, des bateaux « porteurs d’eau » quittaient le Vieux Port, remontant les cours d’eau, pour livrer aux Citoyens français les plus démunis l’eau qui leur avait été confisquée pour cause de factures impayées. Ce service républicain s’arrêta brutalement au son des matines.
Cette rêverie fût provoquée par un courriel reçu de CEP 17, une association rochelaise militant pour un service public de l’eau. La République se meurt de droite à gauche et de bas en haut, la Charente-Maritime n’y fait pas exception.
La question de ce courriel : - « Partagez-vous l’idée que l’eau ne doit pas être une marchandise ? … Si d’ores et déjà vous souhaitez intervenir dans le débat en faveur d’une gestion publique de l’eau, nous vous rappelons que vous pouvez nous écrire. »
D’où cet article qui sert également de piqûre de rappel pour une gestion plus républicaine de notre eau.
La quasi totalité ( 99,.. % ) des Services Publics de l'eau gérés par les collectivités font d'énormes cadeaux au privé en nous facturant des parts fixes. Moins nous consommons, plus nous payons et enrichissons les GROS PROFESSIONNELS(1) alimentés sur le réseau des particuliers, ce qui est le cas dans TOUTES les collectivités !!! (1) agriculture, hôtellerie, laveries divers, etc.
Discourir sur une gestion privée ou publique SANS exiger la suppression totale des PARTS FIXES de nos factures d’eau ( aussi minimes soient-elles ), c’est méconnaître(2) les conséquences sociales et l’iniquité républicaine qu’il en découle. (2) ou faire semblant de méconnaître
Que pense le citoyen et de très nombreux ruraux, lorsqu’on leur annonce un prix du mètre cube (m3) à 3,50 € avec une gestion privée, et que, s’il y avait une gestion publique le m3 serait à 3 € ? C’est ignoré qu’ils payent le m3 plus de 5 €, voire 10 ou 20 € et ce, avec une gestion d‘élus sponsorisés souvent par la Gauche. C’est ignoré que le prix de son propre mètre cube peut être le double ( ou plus ) de celui de son proche voisin. La droite se tait, ayant fait une allergie à ce type de débat. Débat qui devrait donc toujours se baser sur la réalité quotidienne de l’usager-consommateur, où il existe un vrai problème.
( Pour être le plus honnête possible, il faudrait donner la fourchette réelle du prix de vente du m3 : entre le prix d’un mètre cube pour une consommation annuelle de 1 m3 et le prix d’un mètre cube pour une consommation annuelle de 1000 m3 )
La question de CEP 17
- Partagez-vous l’idée que l’eau ne doit pas être une marchandise ?
La réponse d’igepac par Pierre PETIT
Des jeux de mots qui nous coûtent cher
Si je prends votre question au premier niveau de lecture, je réponds NON, je ne partage votre idée. Mais je précise aussitôt : « L'eau n'est pas un bien marchand comme les autres mais un patrimoine qu'il faut protéger, défendre et traiter comme tel » ( Directive cadre du 23 octobre 2000 ). Un fait incontestable : l’eau se vend et s’achète, c’est un bien marchand tout comme la voiture également issue des dons de notre Terre, du minerai de fer au pétrole. On peut vivre sans voiture mais pas sans eau. Ne rêvons pas et revenons sur Terre avec un argument juridique : « La distribution publique d'eau potable est une activité économique » nous rappelle un arrêt de la Cour de cassation ( n°06-20262 du 20 novembre 2007 ).
« L’eau n’est pas une marchandise » est un slogan trop souvent utilisé pour justifier l’aide au secteur privé local, artisanal et commercial.
D’un point de vue purement intellectuel, prétendre que l’eau n’est pas une marchandise c’est sous-entendre ou défendre l’idée que l’on doit payer une redevance pour un service rendu, ce qui a conduit nos élus à la pire des gestions républicaines : transformer une location de compteur d’eau(3) en parts fixes diverses et variées nommées « abonnements » sur les factures d’eau et d’assainissement, dépassant les 200 € par an et cela dans l’indifférence générale.
(3) dont le prix d’achat est d’une cinquantaine d’euros
« Tout le monde doit payer … »
( Cet argument n’étant pas fondé, la suite est fort variée )
Pourquoi cet argument aux relents collectivistes(4) est-il aussi souvent repris par la droite ?
(4) Cet adjectif est à peine provocateur. Mais à bien y réfléchir et pris au bon niveau, il est significatif : une même participation financière obligatoire pour tous, du plus pauvre au millionnaire sans même avoir une seule goutte d’eau. De plus, pour celui qui ne peut pas payer, l’accès à l’eau lui est retiré. Dans ce cas l’adjectif « stalinien » serait plus correct car il n’y a aucun jugement ni circonstance atténuante avant la coupure d’eau.
C’est un rescapé de ce goulag qui vous le rappelle car un hiver sans eau courante, au XXI ième siècle est encore très pratiqué dans nos campagnes où une meute aux aguets, sauvage et féroce, sort de sa tanière au moindre frémissement d’impayé pour quelques euros. Des élus qui se prétendaient de « gauche », faut-il le préciser ici, ont envoyé leur bourreau ( le délégataire ) exécuter leur sentence. L’eau a été coupée et l’abonné supprimé. La mise à mort de l’abonné fût accompagné d’un silence religieux, dans une meute composée de plusieurs centaines d’élus !!! Petit détail de cette affaire : l’abonné ne devait pas un centime lors de la coupure d’eau. Une erreur de facturation ? Le dossier est entre les mains de la justice.
Nous avons encore vu récemment ce même drame sur le blog igepac, une famille avec un jeune enfant !!! Et toujours ce silence mortel !!! ( C’est pourquoi l’homme des hautes plaines est devenu le film fétiche d’igepac, voir en fin d’article. )
Que font nos parlementaires ?
- Rien, toutes classes politiques confondues. Ils sont TOUS pour le maintien des parts fixes. Il y a une dizaine d’années lors des débats sur la Loi sur l’eau, quelques Verts dont Yves Cocher en tête y étaient opposés et depuis SILENCE ! Le statut de parlementaire ne permet pas à nos élus de se mettre au niveau de leurs concitoyens, ces mêmes personnes qui leur ont offert leurs fauteuils dorés. Pensez donc, que représente un cadeau de 200 € pour un député ou un sénateur ? – Rien.
Pourquoi une telle unanimité autour du maintien des parts fixes, voire même à encourager leur extension aux ordures ménagères, par exemple ?
Demander au plus petit des particuliers de payer plus pour que le plus gros du secteur privé paye moins est-ce une pratique républicaine, et cette pratique est-elle légiférée par un petit ou par un gros ?
Donnons ici quelques pistes constatées :
- La conséquence financière est incontestable : faire bénéficier aux plus gros consommateurs et pollueurs d’un tarif minimum et toujours inférieur au coût de la production ( ou du service ). C’est mathématique, du niveau collège ;
- « Ne pas pénaliser » les agriculteurs et autres gros bénéficiaires ;
- Augmenter une facture sans augmenter le prix du mètre cube ;
- Donner un prix du mètre cube en-dessous du coût réel ;
- Pour 90 % des élus d’un syndicat : « se faire payer un repas après une réunion avec le délégataire, ça ne se refuse pas » ;
Etc. …
En guise de CONCLUSION
Avant de commencer à parler de service public , la suppression des parts fixes est primordiale, dans une République digne de ce nom,. Elle doit s’accompagner de nouvelles mesures, bien réfléchies cette fois , prises en dehors de la gestion financière actuelle de l’eau pour des cas très spécifiques comme par exemple les lieux touristiques où un grand nombre de maisons secondaires pénalise les résidents à l’année. Il n’y a aucune raison sociale ou morale de continuer à imposer ainsi les plus petits consommateurs-pollueurs, ou de favoriser les plus gros …
Le boulanger, l’épicier, le commerçant en milieu rural qui fait du porte à porte pour trouver d’éventuels clients sait très bien gérer son activité sans abonnement.
Saluons au passage la ville de Valenciennes ( fief de M. Borloo ) qui, avec Lyonnaise des Eaux, vient de supprimer les parts fixes, ce qui fut bénéfique à 70 % de la population !
De nombreux articles consacrés aux parts fixes sont présents sur le blog igepac dans l’attente d’une synthèse, un gros dossier à venir.
Privé ou public, ce n’est jamais un problème de prix de l’eau mais toujours un ensemble d’intérêts et souvent dans des eaux troubles. Droite ou gauche, AUCUNE différence notable sur le terrain : un simple constat d’igepac.
Vrai service public
1- OUI pour un vrai service public géré par des Politiques compétents dans un intérêt collectif répu-blicain, autre que financier et bien sûr SANS PART FIXE.
2- Ce qui n’empêche pas l’intervention de la sous-traitance privée dont les compétences techniques sont indiscutables et parfois indispensables.
3- La gestion financière ne doit pas JAMAIS être confiée à un professionnel de l’eau mais à un comptable professionnel.
4- Le prix de l’eau ne va pas et ne doit pas baisser surtout parce que nos stations d’épuration polluent fortement nos rivières, les épandages des boues sur des terres agricoles polluent le sol et le sous-sol et si nous voulons remédier à ces pollutions, nous devrons débourser quelques euros de plus ! Prévoir le long terme et ne pas cacher la vérité font partie des obligations d’une gestion publique.
Un retour à une gestion publique doit permettre des investissements à longs termes (5) pour lutter contre la pollution et non une baisse importante du prix du mètre cube. Les dépenses consacrées à l’épuration des eaux usées sont déjà ( ou seront ) la plus grosse part de notre facture d’eau.
(5) ce que le privé ne peut pas faire – la gestion à longs termes est un argument de poids en faveur d’une gestion publique.
& Faux service public
1- Qui fait mieux ? Paris est l’exemple d’un vrai désastre d’une gestion PUBLIQUE : Paris se vente sur Internet d’avoir une eau peu chère, conseille pour les nourrissons une eau à 40 µg/l de nitrates et va épandre sa pollution de « merdes »(6) chez ses voisins … .
Le Moyen-Age est vraiment de retour, sa Seigneurie fait la loi et les vassaux subissent ! Si le privé ( la Générale des Eaux ) a conduit cette politique, le public ( Ville de Paris ) la poursuit allègrement avec fierté !!!
2- Une gestion publique peut coûter parfois très cher. A titre d’exemple et d’actualité : un SPANC de Côte d’Or, qui est un des plus chers de France avec une redevance à 185 € pour 6 ans, est en gestion publique faite par des élus qui se revendiquent de … !!! Hé, oui encore la … .
( les … permettent de respecter la neutralité d’igepac dans cet article : 4 « droite » et 4 « gauche » )
(6) Une remarque locale : un énorme bug dans le scénario d’une gestion publique
En Charente Maritime, la pollution des terres agricoles par épandage est gérée par un syndicat départemental, si j’ai bonne mémoire, et sur l‘île de Ré la culture bio en bout de station d’épuration est imminente ! De la gestion publique au service du privé, de quelques exploitants agricoles.
Ces constatations locales peuvent donner suite à votre débat pour prendre en compte la santé publique car la gestion publique ne se limite pas à quelques centimes d’euros du mètre cube. Une question d’igepac : pourquoi une collectivité peut-elle se permettre de polluer sciemment le sol et le sous-sol ( donc les cultures et les nappes phréatiques ) aussi facilement, en négligeant les conséquences néfastes sur la santé de ses administrés, aussi minimes ou imprévisibles que peuvent être ces conséquences ? Et ce sont ces mêmes élus qui, au nom de la Police de l’Eau, vont nous faire ensuite la morale dans les SPANC ! ! ! Forcément, côté citoyens-consommateurs, ça ne passe vraiment pas.
Il faudra une vraie révolution intellectuelle et républicaine de nos futures élites pour espérer un changement de cap, autre que celui du profit financier réservé à quelques « copains ».
igepac m’aura permis de voir de plus près le visage d’une Marianne qui a pris bien des rides depuis mon enfance.
Le blog de CEP 17 : http://cep17.overblog.com
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High Plains Drifter, Clint Eastwood 1973
Les habitants d’une ville assiste à un meurtre sans réagir. Tout un symbole … éternel, tant qu’il y aura des Hommes.
L'Etranger commence par accepter les pouvoirs que le peuple lui accorde pour les protéger contre le retour de hors-la-loi. Les habitants lui vendent leur âme en lui promettant de lui donner « tout ce qu'il veut » sans condition. Il accepte mais les humilie et leur plonge le nez dans leur couardise. Après leur avoir vaguement appris à se battre, il leur fait repeindre la ville en rouge, la rebaptise ENFER, tue les trois bandits lui-même et brûle la ville.
De la même façon que dans « Le train sifflera trois fois », toute la ville devrait faire face aux bandits, mais tout le monde choisit de se cacher et de laisser le héros seul contre une bande de brutes. Un discours éloquent sur la mentalité de l'être humain. Pourquoi s'em…bêter à agir alors qu'on peut attendre que quelqu'un d'autre le fasse à votre place, même si on le déteste ?